mardi, décembre 10

[Ce soir...] Civet de biche au Cahors et aux légumes racines



Et nous revoilà au fondamental, au cœur du noyau de l'essentiel substantiel. Une planète dans une marmite, un éden gourmand en cocotte. Peu d'exogène, pas d'accessoire, une seule louche pour le service ; rien qui traumatise, sinon dans le bon sens.

Si je ne cautionne pas les pan-pan excessifs des sous-bois (surpeuplés pour mieux canarder), je ne peux cacher un certain attrait pour ces chairs foncées sauvages que l'on appelle noblement « venaison ». Ainsi, si les petits gibiers, poêlés ou rôtis, ont leur charme, je défie quiconque de résister à ces daubes, fricassées et civets de plus gros spécimens, que l'on mitonne sur plusieurs heures avec respect, application, affection, concentration... et plaisir. 

La bébête est coriace, et c'est là son seul gros point faible ; qui cesse d'en être un si l'on connait l'astuce élémentaire pour l'éliminer : une marinade qui dégomme ; le genre de liquide que l'on bombarde de saveurs en devenir. Carottes, oignons, ail, laurier, thym, sauge, poivre en grain, baies de genévrier... (Mais pas de sel.) Tout ça ne pourra que contribuer à la bonne gestation giboyeuse mise en œuvre dans une certaine quantité (comptons une bouteille pour un kilo de viande) d'un bon vin rouge (un Cahors notable ?). Vingt-quatre heures d'attente (car ceci ne se fast-foode pas à la sauvette...) au frais, une heure et demi de remise à température ambiante, et on peut y aller.

C'est l'instant des gestes, basiques mais essentiels : quelques découpes de légumes racines (panais, rutabagas, céleri rave...) en cubes de taille moyenne, le temps que la viande remonte lentement en température. Au bon moment, les morceaux (de civet de biche, par exemple) seront ôtés de leur marinade et de tout élément constitutif de celle-ci avant d'être déposés dans une cocotte en fonte à bonne température où les attendra une matière grasse (moitié Mycryo, moitié graisse d'oie, pour ma part) bien chaude. Sans trop les y laisser, les morceaux seront marqués sur toutes les faces puis mis de côté. Aussitôt, les légumes racines rejoindront la cocotte afin d'en réaliser une précuisson de surface ; brassons et re-brassons l'ensemble, ajoutons la viande, les éléments solides de la marinade, du sel, une pluie de farine tamisée, mélangeons le tout et puis ajoutons le liquide de la fameuse marinade avec éventuellement un peu d'eau, si la quantité ne semble pas suffisante (les morceaux de viande doivent être immergés ou presque). 

Ultime instant de patience : une cuisson lente à feu doux. Une cocotte en fonte qui se respecte fera le reste grâce à une conservation et à un habile recyclage de l'humidité de l'ensemble. À l'heure dite, on sert sans attendre, avec du persil plat ciselé et quelques cornes de gatte pour ramasser la sauce. On est là face à quelque chose de costaud, de parfumé, d'addictif ; le genre de plat que l'on s'octroie un dimanche où l'on peut se laisser le temps de l'oisiveté digestive et des sagesses eupeptiques.

À vous de goûter !

mercredi, décembre 4

[plat de Résistance] L'envie en rose

« Vieux sépia bourbon cherche beau rose poupon. »

On a déjà vu plus sain comme petite annonce. Pourtant, c'est une image qui peut venir assez rapidement à l'esprit lors de copieuses séances de téléphagie crépusculaire. Voix mielleuse qui a vécu, musique d'une autre époque et autres effets lourdingues engraissant la liasse d'images d'Épinal d'usage ; on tient l'archétype de la publicité nostalgique, celle qui happe tout : ménagère de plus de cinquante ans et toute la clique.

À cet égard, question existentielle : quid des émoluments de ces acteurs prêtant leur verbe à de tels numéros de cirque ? Ou plutôt : quelle carotte peut bien amener des individus d'un certain âge à s'auto-proclamer chantres débonnaires de la fausse véritable tradition et à vanter les mérites de charcuteries nitritées avec maîtrise ?

Il est vrai cependant que si l'on tient compte de la date de naissance de ces birbes loquaces (à qui l'on donnerait, au moins, le bon Dieu sans réflexion), probablement expulsés à l'aube des années 1950, tout en situant les premiers sévissements chimiques alimentaires de masse dès 1970, on peut admettre que ces individus ont assez rapidement eu accès à ces denrées du troisième type et que cette consommation du tout lisse et tout pareil a fait partie de leur « jeune temps ». Légitimes, donc, seraient-il, lorsqu'ils prétendent retrouver des « saveurs d'antan » dans les multibombardés comestibles sous cellophane d'aujourd'hui.

Plus de trace, plus aucune miette du temps des quintessences, ni des matières premières en évidence. Pour un témoignage plus ou moins authentique, il faut remonter, loin, bien loin, début XXe, déterrer un poilu... Mais là encore, on aurait des misères. Il nous dirait ses déboires, sa petite santé mise à mal par cette avalanche de conserves qui lui avaient filé le scorbut fatal... Il pourrait être capable de vanter notre temps. Autant arrêter là.

Quelle action face à ces falsifrelateurs d'in(te)stin(ct)s ? Le papier glacé et le tout-au-cathodique ont eu le mérite de nous affuter les globes oculaires. Promo détectée, produit acheté, et kling le tiroir-caisse. Geste moderne devenu axiome ; rien de grave, vu qu'on n'en meurt pas. Des décennies d'ingestion neutre : du lisse, du mou, du moyen, du normal, du similaire... Ouais, mais c'était en promo !

Dégourdissons-nous donc les atrophies. Les goûts, les couleurs, les saveurs, les odeurs, les textures... Tout ça, c'est biaisé sur toute la ligne. Les sensations ? Au placard depuis toujours. Goût, toucher, odorat ? Connais pas. Tout ce qui sonne un tant soit peu primaire est banni, refoulé, inhibé, car révélateur d'un stade antérieur de notre évolution. C'est bien notre marotte, ça, l'évolution ; un prétexte à l'oubli des bases, une intelligence du déni. D'individus conscients du changement nécessaire du bol alimentaire, nous nous muons suiveurs, gloutons de panure ; on suit, on suit, et crac, on se rend compte, tard très tard, et puis on conscientise et on change tout. En somme, on rattrape le vice humain et ses éternelles longueurs d'avance.

Quant au jambon rose bonbon et autres tranches alignées en barquette sur-vantées, on en est encore aux balbutiements. Au pays des palais dociles et des papilles en berne, les chimères et les marketeurs gardent le fouet. Car qui d'entre nous serait prêt, aujourd'hui, à préférer le gris viande inerte au rose Porcinet ? Je vous le demande ? Biaisés, vous dis-je ! Il serait peut-être temps de prendre les armes que sont nos bouches, dents, narines, doigts et bon sens, afin de se rendre compte, une bonne fois pour toute, que la vérité ne sort pas indiscutablement des images de l'écran.

Soit dit en le pensant.

À vous de goûter !












samedi, novembre 30

[Papilles aux aguets] Quatuor chocolaté sous la loupe

Une table basse plus ou moins large et libre d'accès : c'est fait. Un bon siège garant d'une détente musculaire optimale : disponible. Un quasi-silence savamment brisé par un fond musical de bon aloi (un Tindersticks qui prend succulemment son temps) : OK aussi. Tous les ingrédients semblent réunis pour un agréable début de soirée placé sous le signe de la dégustation.

Au menu du jour, un produit on ne peut plus inégal, dont un pied traîne dans la boue peu reluisante de la catégorie des sucreries, tandis que l'apex de l'aile touche l'excellence des plaisirs les plus fins. En plaques, en bâtons, en pépites, noir, au lait, blanc, marié avec condiments, fruits et épices, en veux-tu en voilà... Le chocolat, c'est un peu le palliatif en vente libre, la drogue douce - très douce - que l'on s'injecte à pleines dents, le vice que l'on confesse vertueusement et avec le sourire...

Nul besoin de vous dissimuler mon absence total d'intérêt pour certains produits sucrés chocolatés desquels la simple énumération de la composition vous ferait réclamer fissa votre kit du petit chimiste au grand mitré rougeaud de saison, ce lapomaniaque perfide qui lui-même distille ce genre d'horreurs diabétisantes et répond ainsi aux desiderata déjà insistants de notre attendrissante faune en culotte courte, laquelle ignore tout à fait qu'elle s'exerce candidement aux sous-disciplines initiatiques de l'appât du gain. (Respirez.)

Nous parlons bien ici de chocolat, soit d'un aliment dont le premier ingrédient de base est la pâte de cacao. Par ailleurs, pour éviter toute comparaison trop complexe et protéiforme, j'ai souhaité me restreindre aux critères de sélection suivants : il doit s'agir de chocolat noir ; le pourcentage de cacao doit être de 70 % minimum ; la liste des composants ne doit pas contenir de dénomination douteuse.



Cette étape étant franchie (ouf !), il est maintenant possible d'opérer une dégustation plus ou moins équilibrée de quatre produits d'une même gamme, à savoir : le 70 % Intense de Galler, Alter Eco noir du Pérou, Ethiquable noir du Nicaragua (tous deux affichant 75 %) et le chocolat cru de la marque Ombar (72 %). Une sélection qui, je précise, est comme toujours pétrie de l'excessive subjectivité qui est la mienne. Bon et en bouche, ça donne quoi ?

Autant vous le dire d'emblée : le moment est des plus plaisants ; je ne pourrais ainsi honnêtement me permettre de rejeter l'un ou l'autre des candidats pour une raison arbitraire et définitive. D'ailleurs je les garde tous ! Avec cependant quelques préférences... Alors en piste !

Texture : première impression des produits (au-delà du visuel qui, dans le cas présent, ne varie que très légèrement) ; si le Galler séduit par son onctuosité et son homogénéité, Alter Eco et Ethiquable dévoilent un côté plus sauvage, plus brut,  assez appréciable également : ça croque plus que ça ne fond. Quant à Ombar, la température de cuisson bien plus faible par rapport à celle habituellement utilisée pour un chocolat dit « normal » donne à ce chocolat « cru » une texture tout à fait particulière assez lointaine des standards classiques : un mélange intrigant de poudreux et de gras soyeux.

Amertume : caractéristique fondamentale du chocolat noir, celle que l'on adore ou que l'on fuit. Naturellement, une personne souhaitant limiter ce titillement contre-nature du palais s'orientera davantage vers le Galler (au pourcentage de cacao le plus bas, pour rappel) dont l'onctuosité va de pair avec une saveur douce-amer fort bien équilibrée. Il ne se démarquera toutefois pas outre mesure du produit Ombar, adouci par du sucre de noix de coco, ni des deux tablettes équitables quoiqu'un rien plus « piquantes ». La chose aurait été bien plus palpitante si un intrus 85 % voire 99 % (le genre de produit que l'on ne goûte qu'une fois...) s'était immiscé dans la partie.

Arômes : c'est là que ça se joue. Galler, comme à son habitude, nous propose quelque chose de très carré et scolaire : fruits secs, grillé, peu fruité, soit une formule gagnante bien connue. Les trois exotiques sortent assez bien des sentiers battus pour le palais finalement assez peu initié qui est le mien. Ainsi, pour Alter Eco, on pense directement aux baies séchées de type canneberges ou encore à du pruneau ; c'est nettement plus fruité et un poil âpre, surprenant mais pas déplaisant. Chez Ethiquable, c'est un peu plus conventionnel ; on aurait même l'impression d'un pourcentage de cacao inférieur au chiffre indiqué, tant l'attaque parait modérée ; la saveur générale balance entre le fruité et le grillé, ce qui n'est pas particulièrement négatif, même si ce manque d'affirmation m'a quelque peu déçu. L'OVNI Ombar surprend de nouveau par sa singularité ; si j'avais beaucoup appréhendé le moment de la dégustation après avoir lu le mot « coco » sur l'emballage et craint une présence écrasante dudit fruit, je suis très agréablement surpris de constater qu'il n'en est rien, ou presque. Si l'on sent d'emblée qu'il n'y a pas qu'une seule « âme » dans cette petite tablette, la qualité et le traitement délicat du cacao utilisé donnent à ce dernier une force assez hors du commun qui garantit un succulent duel au sommet.

Et le prix ? Mince le mot qui fâche... Avant d'annoncer les chiffres, rappelons qu'il s'agit là de produits de dégustation et non de la bonne demi-livre enturbannée de plastique mauve et boviné que l'on s'engouffre à la sauvette. Au reste, les trois premiers de la liste affichent des prix plus ou moins similaires et finalement plutôt raisonnables : si les 80 gr de Galler ne dépassent pas les 2 euros, le prix des 100 grammes des équitables Alter Eco et Ethiquable oscille entre 2,20 et 2,50 euros. Et c'est de nouveau le petit cru qui se distingue en crevant le plafond avec ses 2,50 € pour ses maigres 68 gr. 

Pour conclure, je ne peux que reconfirmer l'agréable moment passé en cette si charmante compagnie. Par ailleurs, en terminant récemment les paquets des deux produits équitables et du chocolat cru (qui, pour votre information, est également certifié bio), j'ai constaté que l'intérieur des trois emballages recelaient d'explications tantôt informatives tantôt humoristiques, lesquelles ajoutent aux produits une petite note ma foi fort bien sympatoche. Des plus, des moins, des goûts, des couleurs ; de nouveau, la formule s'impose...

À vous de goûter !

dimanche, novembre 24

[Ce soir...] Soupe de chili con carne ou chili con carne en soupe, comme vous voulez...



« Mange ta soupe ! » Si beaucoup d'entre nous n'ont jamais eu à subir ce type d'injonctions traumatisantes qui font froid dans le dos, et ce dans le simple et humble but de se donner chaud à la carcasse (un mal pour un bien, mais un mal tout de même !), ces trois mots, si impérieux soient-ils, restent immanquablement associés à une tradition poussiéreuse mais néanmoins chaleureuse : le rituel du potage quotidien ; celui qu'à l'origine, on ingérait avant tout à des fins de préremplissage tempéré et réconfortant d'un estomac qui allait très probablement risquer de ne point trouver son compte avec le frugal plat, généralement sans fioritures, qui allait suivre (dans le meilleur des cas).

Aujourd'hui, époque fastueuse et apologétique des légumes racines et autres tubercules que l'on aurait pourtant été tenté d'éradiquer de la surface du globe en des temps passés plutôt pénibles pour nos aînés, les soupes ont incontestablement la cote (et la côte aussi, si l'on y met des bettes, par exemple...). Les plus siphonnés du chaudron d'entre nous s'emploient d'ailleurs à tenter les associations les plus inimaginables, pour le meilleur comme pour le pire des résultats. En cette belle saison préhivernale, il semble que tout un chacun soit tenté d'y aller de sa propre mixture et de surfer sur cette tendance liquide avant qu'elle ne déborde et que l'on passe à autre chose, comme toujours.

Forme hybride et inclassable, pourtant servie dans nombre de restaurants, généralement outre-Rhin ou plus à l'Est et au Sud de l'Europe, selon les ingrédients, la soupe-repas est ce que l'on pourrait nommer la quintessence de la gourmandise d'assiette creuse. En une louche, vous voilà embarqué instantanément pour un petit monde à part, au chaud et en confiance. Étant moi-même partiellement germanique, je pourrais citer de très nombreux exemples, parmi lesquels les célébrissimes : Kartoffelsuppe (soupe de pommes de terre avec lardons ou rondelles de saucisse), Erbsensuppe (même principe mais avec des pois cassés) ou encore la Gulaschsuppe (soupe rouge épicée d'origine hongroise consommée dans une grande partie des pays d'Europe de l'Est ainsi qu'en Allemagne ; selon les versions, elle peut inclure des morceaux de bœuf, de porc, de cheval, de veau ou d'agneau).

En y songeant bien, ces plats ne sont finalement, à la base, « que » des plats mijotés auxquels a été ajoutée une certaine quantité de liquide qui a provoqué ce changement de catégorie. Aussi me semble-t-il tout à fait possible de créer des soupes à base de quelque tambouille traditionnelle habituellement restée non travestie (par principe, par orgueil, je l'ignore). Un bon chili con carne maison ne devra, par exemple, pas être trop chamboulé que pour acquérir son statut de soupe-repas. Ainsi, selon l'usage (même si les versions pullulent), après avoir fait sauter oignons et ail émincés, poivron rouge et courgette en petits dés, ainsi que les haricots noirs encore fermes (que nous aurons pris soin de faire tremper une nuit, puis de cuire à l'eau pendant une demi-heure) pour changer des rouges, nous ajouterons cumin, piment moulus et une bonne quantité de bouillon de boeuf maison ainsi qu'une boîte entière de tomates concassées en cubes. Le bouillon étant déjà salé, je préconise de rectifier l'assaisonnement en sel après l'ajout de celui-ci. En fin de cuisson, pour aligner une couleur supplémentaire, quelques grains de maïs précuits peuvent être de bon aloi, si le cœur vous en dit. Une envie du moment m'a, par ailleurs, incité à ajouter quelques tranches de chorizo doux ; mais comme pour chaque étape : c'est vous qui voyez.

Et puis, c'est comme pour toutes les soupes : on laisse faire, on laisse prendre leeeentement. Au reste, si le liquide ne vous semble pas assez épais, rien ne vous empêche de laisser mijoter quelque temps à découvert pour que ça réduise. Il ne nous reste plus alors qu'à patienter (étape la plus pénible !), et à s'en offrir quelques louches. À mon sens, aucune boisson ne pourrait enjoliver ce plat tout-en-un qui se suffit à lui-même. Vos meilleures armes ? Une cuillère à soupe qui tient la route. Et un verre d'eau, à la rigueur, si vous y tenez...

jeudi, novembre 21

[Je tente donc je mange] Chicon braisé au café et Rapadura



Chers mangeurs, vous ne le savez que trop : la téléréalité a envahi nos marmites. Désormais, la moindre petite omelette pantouflarde du dimanche soir se confronte irrémédiablement au numéro 3 de la saison 7 de Machin-chouette Chef. 

La ménagère tremble sur ses bases (image peu élégante, je vous l'accorde), et flirte avec le nervous breakdown peu télégénique si elle échoue face à l'impératif inexorable et sociétal de notre décennie : conclure sa blanquette en l'espace de trente minutes top chrono.

Je sais que je me répète, mais la gastroréalité, c'est avant tout un sport extrême pour celui qui la subit. On est matraqué, submergé par tout et surtout par rien. Des ébauches brisées dans l’œuf, des tentatives flambées net... Trois heures pendant lesquelles on mange son pain noir sans en avoir pour sa faim. 

Or, il est quelque exception fortuite, à la frontière du hasard et d'une procrastination pâteuse qui vous a incité au zappage décervelé frénétique à défaut de toute autre activité digne d'intérêt. Et vous tombez sur une idée originale qui titille vos velléités culinaires. Concrètement, il s'agit d'un chicon braisé au café, accompagnement fantasque évoqué furtivement dans l'émission Comme un chef (RTBF).

Aucune piste, aucune recette : un do-it-yourself semi-encadré ; il va s'agir d'interpréter et d'inventer. Le chicon, il se braise comme toujours : dans une matière grasse bien chaude après avoir ôté le cœur amer en l'extrayant par le pied à l'aide d'un couteau pointu, ainsi que les premières feuilles. Par ailleurs, comme tout est bon dans le chicon, les feuilles délaissées peuvent être conservées pour un modeste potage qui réchauffe les petits corps en proie aux premiers froids. Une fois bien attendri et après l'avoir (re)mouillé, on ajoutera une cuillère à café de café (répétition irrémédiable...) moulu et deux de Rapadura (sucre brun non raffiné à la saveur de caramel et riche en sels minéraux). Il s'agira maintenant de couvrir la poêle/casserole afin de cuire le chicon à cœur. La fin de cuisson se fera à découvert afin de laisser le jus réduire au maximum pour qu'il puisse napper le chicon. Une pincée de fleur de sel créera un contraste surprenant.

Sans se faire de bile, on accompagnera notre légume excentrique d'une bonne tranche de foie de veau aux échalotes et au vin blanc ainsi que de quelques choux de Bruxelles vapeur. Les perspicassiettes d'entre vous auront vraisemblablement remarqué l'absence de féculents dans cette assiette. On ne peut rien vous cacher ! Cet oubli volontaire, très chers, je l'ai commis dans votre intérêt. Il ne m'a, en effet, pas paru nécessaire d'évoquer le restant de stoemp de poireau qui a eu gagné mon assiette une fois la photo dans la boîte et que je me suis empressé de dévorer avidement. Mais chut ! Que ceci reste entre nous.

À vous de goûter !

mercredi, novembre 13

[Préambule] Céleri remoulade, wasabi, tamari et saumon fumé

Il n'est pas impossible que l'intitulé du présent article (ou en tout cas les premiers mots de celui-ci) n'évoque pas de réels bons souvenirs chez d'aucuns. Je pense aux écoliers d'il y a quelques dizaines d'années, lesquels se voyaient parfois contraints par de tortionnaires adultes de rester assis afin d'avaler jusqu'à la dernière fibre l'amas blanchâtre et suintant qui gisait alors dans une assiette ordinaire impitoyablement blanche.

La pire devait vraisemblablement être la fadeur de ladite préparation. On imagine que trop bien le seau en plastique de cinq ou dix litres de mayonnaise industrielle bien compacte, bien tremblotante quand on la secoue. On voit clairement l'énorme récipient au-dessus duquel le cuistot s'évertuait, à grands coups de biceps, à touiller la gigatambouille qui tapisse les estomacs juvéniles et rassasie fissa les petites têtes pensantes à poil doux.

Mais il ne faut pas grand-chose, même trois fois rien, pour optimiser ce bon légume servi cru et constituant dès lors une bouchée apéritive ou une entrée on ne peut plus saine. Encore faut-il pouvoir déterminer ce qu'on lui reproche exactement. Un manque de goût ? Ajoutez-y donc un peu d'aneth et quelques lanières de saumon fumé. Un manque de puissance ? De l'oignon cru finement haché et une mayonnaise au wasabi, que diable ! Encore un peu de corps ? Une petit lampée de Tamari (sauce soja puissante, qui a le mérite de ne pas contenir de blé, contrairement aux sauces soja ordinaires) et le tour est joué. Bien entendu, la mayo que vous ajouterez à l'ensemble sera maison ou ne sera pas !

Difficile, à présent, de choisir le récipient qui récoltera cette préparation devenue fine et savoureuse ; et ceci pour la simple et bonne raison que ce modeste céleri rave râpé désormais noble peut se servir tant en verrine ou sur une cuillère (pour une mise en bouche ou une bouchée fraîche et savoureuse) que dans une grande assiette creuse digne de ce nom pour un repas léger ou une entrée originale et à bon prix !

À vous de goûter !

dimanche, novembre 10

[Rond de carotte] "Ratatouille viande hachée"




Haut comme trois pommes de table petit calibre, épais comme un trognon bien rogné ; c'est à peu près de cette manière que l'on aurait pu décrire l'allure de ce petit garçon discrètement et nerveusement au monde, il y a de cela une bonne vingtaine d'années.

C'était le temps des horribles jeux de ballon, des effrayantes récréations et des réprimandes pour distraction, le tout baigné d'un parfum mêlé de Fristi aux fruits rouges (substance laiteuse rosâtre qui semble avoir fortement perdu de sa popularité ; vilipendez-moi si je me trompe) et de plasticine sèche ... Mais heureusement venait quotidiennement le temps de la trêve à heure fixe, précisément celle où l'agitation, sous forme de petits êtres sur pattes plus ou moins innocents mais remuants, se concentrait autour de minuscules boîtes multicolores hermétiques, desquelles étaient extraites quelques tartines de pain blanc compressées garnies d'un fromage neutre ou d'une autre garniture bien sucrée.

C'était là l'occasion rêvée de filer, de prendre la poudre d'escampette anglaise pour tailler la route... Car, à quelques mètres du boucan, se trouvait le motif, l'alibi, le sauveur, sous la forme d'une dame d'un certain âge (on lui donnait une petite soixantaine d'années) à l'accent germanique bien marqué. « On venait le chercher ».

L'heure passait vite, trop vite, et déjà la nervosité du retour dans l'arène se faisait sentir, à force d'anticipation tremblotante. Aussi, si le refuge n'était point paradis, il était toutefois l'écrin d'un temps mort, d'un repos inespéré. D'un point de vue sensoriel et avant tout olfactif, il est à noter que les odeurs susmentionnées, néfastes de par leur hégémonie et en raison de ce qu'elles symbolisaient, avaient fait place à quelque chose de plus primaire et de plus complexe à la fois. C'était salé, c'est certain. On y dénotait des arômes épicés, une note rôtie un peu grasse...

Et une assiette attendait sur la table. La chose fumante n'avait pas fière allure, c'est peu dire. Quelques morceaux de pomme de terre défaits, une poignée de fragments de viande hachée en monticule et un chouïa du liquide de cuisson, le tout déposé au centre d'une assiette creuse. Pas plus, pas moins. La consigne voulait alors que l'on écrasât les tendres tubercules dans le jus aromatique afin de ne rien perdre, mais on n'était pas tenu d'obtempérer. De même, le choix des armes était laissé à la libre appréciation du mangeur. On avait le festin libertaire, en quelque sorte.

Pas emblématique ni culturel pour un sou, ce plat. Ni tout à fait allemand, ni vraiment belge. Les produits étaient locaux, certes, mais aucune famille du voisinage ne pouvait réellement se targuer de servir une telle œuvre. L'emploi des Bintje et du boeuf haché dit « américain » (quand je vous disais qu'elle était batarde, cette recette !) suggérait le stoemp sans trop le faire exprès, tandis que la quantité substantielle de thym évoquait plutôt le Eintopf d'outre-Rhin.

Et on s'en moquait pas mal, en fin de compte, de la filiation nationale de l'assiette. La culture, à défaut d'être quelque chose que l'on suit, peut être, même aussi modestement, créée de toute pièce. Le petit garçon, qui entamait alors son repas, se contentait d'une délectation simple et sans manière, un instant un peu trivial rien qu'à lui au milieu d'une journée envahie de pensées et de sollicitations.

À l'heure actuelle, l'établissement arbitraire d'une liste d'ingrédients et d'un strict modus operandi pour ce plat unique se révélerait être une expérience bien fastidieuse, tant la personne à la base de cette recette, bien que toujours en vie, s'est perpétuellement contentée de se fier à son instinct et à ses réflexes mémoriels. L'explication d'aujourd'hui ne sera donc pas celle de demain. Mais qu'importe ? Ce qui devait être transmis l'a immanquablement été. Et le petit garçon que j'étais, du haut de ses quelques pommes supplémentaires, n'a plus qu'à se souvenir et à progresser papille à papille afin de revenir au Goût.

Enfin, j'en viens presque à déplorer d'inclure cet article dans cette catégorie de plats à bon prix (inclusion pourtant tout à fait justifiée), mais il est peu probable que je m'emploie régulièrement à servir un tel ton nostalgique, ce qui exclut, par conséquent, la création d'une énième rubrique idoine. Un peu de pudeur que diable ! Vous constaterez également qu'il n'est pas fait mention des étapes chronologiques utiles pour parvenir au résultat illustré ; et je ne m'en excuserai pas : une recette familiale peut certes être jalousée, mais en aucun cas ne sera-t-elle répliquée par un tiers, qui se ferait alors piètre usurpateur d'une habitude singulière qu'il n'a jamais vécue.

Et puis, qu'à cela ne tienne ? Mon intention, pour une fois, n'est pas de vous inviter à découvrir ce que vous pourriez manger, mais bien de vous inciter à replonger en vous-même afin de vous rappeler ces plats excentriques et inqualifiables aux noms un peu barbares dont on a parfois honte, mais qui ont le mérite inestimable de nous avoir appris à aimer manger.

À vous de goûter !

N.-B. Il ne fait nul doute que la laitue en arrière-plan de la photo n'est que pure hérésie par rapport à la mouture originale. Mais une volonté de transmission sur le plus long terme m'a fait me rappeler qu'il convenait aussi de veiller à sa petite santé.

jeudi, novembre 7

[Je tente donc je mange] Filet de saumon sauvage, stoemp acidulé au chou rouge et baies roses, fenouil poêlé à l'aneth



Il y a les hasards qu'on déplore, qu'on redoute, et puis il y a les coïncidences qu'on force. Si la présente préparation n'atteindra sans doute jamais la notoriété encyclopédique de l'illustre bourde des sœurs Tatin ni du mélange blanchâtre peu ragoûtant confectionné à l'autre bout de la ligne du Temps par quelque flemmard loufoque et désinvolte avec ce qu'il restait de farine, d'eau et de sel dans sa petite bicoque même pas équipée d'un four (!), je me permets néanmoins de la mentionner sur ce blog qui est le mien, car sa dégustation m'a semblé bien moins pire (et même bien plus agréable) que d'autres spécialités culinaires sorties de nulle part et pourtant devenues cultes.

Point d'exotisme, on reste dans le terroir sans fioritures. Au lieu du très commun et néanmoins délicieux chou rouge aux pommes que tout foyer qui se respecte se met à fomenter dès les premières brumes de l'heure d'hiver, pourquoi ne pas emprisonner toutes les belles saveurs dégagées et perdues au fond de la casserole dans une bonne purée des familles ?

Le modus operandi n'est pas bien décoiffant : un quartier de chou rouge débité en petits morceaux que l'on cuira à la casserole dans un peu de matière grasse ; après quelques minutes, on ajoutera un bon trait de vinaigre blanc ou de vinaigre de vin blanc (pour ceux qui aiment - moi j'aime ! - sinon du jus de citron devrait faire l'affaire). Quelques minutes plus tard, sel, poivre et, si le chou vous semble sec, une nouvelle petite dose de vinaigre ou d'eau (si l'acidité vous lasse) viendront peaufiner l'assaisonnement. Dès que le chou cède facilement sous la dent, le contenu de la casserole peut gagner les bras tendus de la belle purée maison bien chaude que vous aurez préparée tandis que votre chou chantonnait. À force d’œuf (comptons un par mangeur) de poivre noir moulu, de muscade râpée et d'un vigoureux mélange à la cuillère, on obtient un bel ensemble onctueux rose-mauve et hétérogène (comme tout bon stoemp qui se respecte) que l'on parsèmera volontiers de quelques baies roses concassées, tant pour l'œil que pour les papilles.

Pour un peu de fraîcheur, un morceau de fenouil débité en tranches fines sera poêlé rapidement à feu vif dans un filet d'huile d'olive neutre. Une pincée de fleur de sel, de l'aneth hachée, et c'est dressé. Qui dit stoemp dit ? Saucisse !... Andouille !... Toi-même ! Nous parlions création, alors osons : un petit filet de saumon sauvage poêlé sera l'allié inattendu idéal de ces végétaux déjà cuisinés et prêts à dresser.

Voilà une idée parmi d'autres si vous êtes de ceux qui, en ouvrant leur réfrigérateur, regardent avec une mine de plus en plus basse l'éternelle portion de chou coloré excédentaire que l'on ne souhaite plus mijoter des heures ni déguster cru. Rien de plus rien de moins.

À vous de goûter !

mardi, novembre 5

[Rond de carotte] Sardines à la tomate et au romarin sur polenta onctueuse à l'huile d'olive




La Grande quoi ?! Le Maréchal qui ?! C'est loin tout ça ! Près de cent ans, et pas toutes leurs dents... Elle viendra vite l'époque où notre progéniture 2.0 (précisément celle née une poignée d'années après MZ ; comprenez Mark Zuckerberg) ne distinguera plus de leur œil bouffi de dédain la triste et vorace guerre de tranchées de la bataille de Waterloo ; boarf, un conflit c'est un conflit, quoi ! À leur décharge, boucherie pour boucherie, si le devoir de mémoire ne poussait pas parfois à l'abolition d'une bonne once de connerie, il est évident que l'oubli du sang et des bombes se révélerait être la voie la plus évidente et la plus confortable.

Mais nous n'y sommes pas encore. Tandis que le dernier Poilu quitte le monde qui l'a vu naître et les champs de bataille où il tua jadis bien contractuellement son prochain, il nous laisse son barda, sa cantine, et, dans celle-ci, une ration comme on n'en fait plus... D'aucuns diront « tant mieux », tant les matériaux utilisés pour contenir les aliments transportés, en plus d'être dotés d'une robustesse à toute épreuve, pouvaient se targuer d'afficher une toxicité paroxystique devant laquelle nos frêles boyaux sophistiqués et lisses d'aujourd'hui déclareraient forfait et agonie.

Attachons-nous plutôt au contenu. Si pinard, bidoche et fromdu étaient sans conteste les piliers de la pitance à transbahuter, ils étaient bien souvent indissociables d'une denrée millénaire et indétrônable qui, en fin de compte, peut être considérée comme la moins nocive du lot. J'ai nommé : la bien huilée sardine.

Horizontal et docile, le filet de sardine continue de garder une place de choix parmi les nombreuses conserves de poisson, parfois trop exotiques pour être honnêtes. Mais attention : au naturel ou à l'huile, il nous faudra débourser quelques piécettes de moins pour espérer obtenir tout ce qu'il y a de meilleur et de plus omégatroisisé : les arêtes et la peau.

Et c'est à cet endroit précis que s'arrête l'action du Poilu, lequel, après avoir ouvert ladite boîte de conserve, ne dispose que d'un instant pour en engouffrer le contenu dans sa gueule (pas encore cassée) et pour en éponger l'huile résiduelle d'un quignon de pain rassis à point.

Soyons modernes certes, mais gardons la raison : bien qu'il s'agisse d'un produit respectable (n'oublions pas que le Sar dîne à l'huile), le petit poisson gras ne substituera jamais nos charmants saumons fumés tout roses et réguliers. En revanche, sa chair tendre et son goût neutre nous permettront de l'apprêter de bien des manières. Point de raffinement, mais du goût et du respect : une polenta classique à l'onctuosité optimisée par quelques traits d'huile d'olive extra-vierge, une sauce tomate au romarin dans laquelle auront été déposées les sardines découpées en tronçons cinq minutes avant de servir... Une pincée de fleur de sel, et voilà un plat que les soldats de cent ans n'ont pas pu connaître...

À vous de goûter !


dimanche, octobre 27

[Rond de carotte] Choux de Bruxelles et anchois carbonarisés



À l'heure de la consumérisation maraichère où des tomates d'un autre monde sont bradées parmi petits pois incongrus, radis inopinés et (tout de même) quelques champignons de saison (ramassés on ne sait trop où dans quelque pays non identifié d'Europe de l'Est) ; où crevettes et calamars (également appelés depuis peu « organe interne terminal porcin ») planouillent paisiblement par-dessus les continents ; où les modèles culinaires d'antan finissent dénaturés à force de crème stérile et de charcuteries rose Malabar... Il n'est pas question de renoncer à la pitance. Grève de la faim, castration gustative, ça ferait un peu bobo au gros système, c'est sûr... Mais c'est le moral, en plus de l'estomac qui nous chuterait dans les talons, bien bas s'ils sont longs...

Si les pâtes à la sauce tomate, carnée ou non, maison ou dépotée, restent indéniablement un sacerdoce réconfortant (le rouge n'aurait donc pas que la faveur des bovins mâles), il ne nous tombera pas, sur nos petits crânes de consommateurs dociles et bien pensants, une foudre réprobatrice si nous nous tournions vers une autre dimension, sans trop de fantaisie, d'un axiome qui, par définition, n'est ni vraiment contestable ni réellement défendable.

Nul vil détracteur ne viendra donc, je pense, me houspiller le verbe si, en lieu et place de la bolo de facto ou de l'arrabiata repetita, je confrontais la tradition traditionnelle que d'aucuns délaissent (une sauce carbonara se fait sans crème, je vous le jure !) à une originalité modestement saisonnière et peu agressive (un choux de Bruxelles ne mord pas, qu'on se le dise).

Dans le cas contraire, le réquisitoire tiendrait en peu de mots : l'accusé s'est livré à l'ignoble acte d'avoir mélangé ses pâtes (de sarrasin, en l'occurrence) cuites à l'eau dans deux œufs battus auxquels furent illicitement ajoutés du poivre noir moulu, de l'origan et quelques anchois salés à l'huile finement hachés en lieu et place de parmesan râpé... (L'assistance indignée d'entonner en chœur : Oooooooooh !). Votre honneur, voici le plus grave : après les avoir précuits sans vergogne à la vapeur, le prévenu, ayant coupé les plus grosses pièces en deux, a osé déposer sur sa tambouille frauduleuse quelques choux de Bruxelles frais complices juste poêlés. Votre honneur, je requiers une peine sévère pour cet ignoble individu qui, non content de se départir des usages normaux et convenus, n'éprouve aucun remord à l'idée de s'être mitonné une assiette outrancière et extravagante pour un prix inférieur à 6 euros pour deux couverts... (L'assistance de reprendre outrée : Ooooooooh !)

Coupable, plaide-je.

À vous de goûter !

mardi, octobre 22

[Rond de carotte] Burger de boudin noir aux baies roses et graines de sésame grillées, oignons braisés sur purée fine de pois cassés




C'est bien fortuitement que je pousse à nouveau la porte de cette nouvelle rubrique en bas âge toute fraîche. Une idée, un festin, et puis une addition approximative, juste pour voir... Bonne surprise : on n'atteint, encore une fois, pas les 6 euros pour deux couverts !

Une surprise ? Pas vraiment finalement. On a là un beau conglomérat de produits de pauvre par excellence : des pois cassés secs, une carotte, un oignon blanc, du boudin noir salé... Tous ces produits, même mis bout à bout, ne risquent pas de faire frémir le cuir éprouvé de nos magots portatifs parfois aux abois.

Aux marmites, nulle foulure ni entorse. La purée de pois cassés, c'est une purée classique avec 80 % de pommes de terre en moins, lesquelles sont remplacées par 90 % de pois cassés et 10 % de carottes. Mais je vous laisse calculer tout ceci tranquillement... De l'eau, du bicarbonate de sodium pour un vert qui enlace l'œil et surtout une dose de matière grasse de votre choix pour éviter de transformer irrémédiablement votre tambouille prometteuse en une spécialité islandaise de renom : le geyser. Car ces trois légumes d'apparence tranquille et placide ont l'amidon espiègle et connivent, qu'on se le dise !

Dans le pire des cas, vous pourrez mixer et assaisonner (de sel et de poivre) l'ensemble cuit à point après une demi-heure, une période que vous aurez pris soin d'occuper en récurant avec rage et application votre table de cuisson verdâtre d'écume (hé oui, je vous avais prévenu...) ; les quelques minutes restantes, vous les avez consacrées à la cuisson du boudin et des oignons. Quelle bonne idée ! L'oignon, découpé nonchalamment en rondelles de calibre moyen, est assez vite débarrassé dans une assiette après avoir été rapidement sauté à la poêle dans un peu de matière grasse jusqu'à tendreté.

C'est alors qu'intervint le boudin, lequel soigneusement dénudé de son boyau étroit fut écrasé impitoyablement d'une fourchette ferme et arbitraire. Le boudin émietté gagna alors docilement la poêle vide et encore chauffée qui servit pour la cuisson des oignons. Remuée sans cesse afin qu'elle ne brûle pas, la viande, dont les saveurs furent ainsi concentrées, fut ponctuée d'une cuillère à café (pour deux boudins) de graines de sésame grillées et d'une dizaine de baies roses pilées. Remué de nouveau, l'ensemble put quitter le feu.

On l'a tous bien compris : on est assez loin d'un plat indiscutablement fin et délicat ; l'on eut pu dès lors se contenter d'un dressage classique et subdivisé qui n'eût choqué personne (même pas vous). Il n'empêche qu'on ne se fait jamais suffisamment plaisir à mon sens... Alors jouons peu, jouons bien. Il ne s'agit pas là de faire faire des cabrioles graphiques à votre boudin noir qui s'en trouverait tout confus... Visons (sans les poils, car ça colle aux papilles) une présentation gourmande et nette et tâchons d'amplifier les gargouillis. Un emporte-pièce circulaire large maintenu au centre de l'assiette que l'on garnira de l'ensemble des ingrédients superposés permettra à la fois d'obtenir une surface de purée géométriquement circulaire et un burger bien tassé entouré par-dessus par-dessous de quelques rondelles d'oignons.

Bon, pour conclure, je dois l'avouer : les baies roses et les graines de sésame grillées ne sont pas réellement des marchandises associées à un budget courses restreint. Or, si l'on considère le prix de chacun de ces deux produits (environ 3 euros pour 250 grammes de graines de sésame et 2 euros le petit pot de baies roses sèches) ainsi que les (infimes) quantités nécessaires pour cette recette, la facture parait tout de suite bien dérisoire...

Et puis, comme toujours, qui vous empêche de remplacer, de transgresser ? Céleri rave au lieu de pois cassés, raisins secs et noix pour le burger qui pourrait lui-même être constitué de boudin blanc... Vos idées avant tout. Philosophie dans le boudin noir, comme l'aurait dit un certain marquis en appétit (ou appétence, dans son cas propre...)

À vous de goûter !


jeudi, octobre 17

[Rond de carotte] Stoemp de poireau et foie de morue



Badaboum ! Nouvelle rubrique...

Une idée soudaine ? Certes. Pour fêter le cap des 40 000 visiteurs du blog ? Bonne idée !

Mais ne brusquons pas les étapes. Si cette catégorie spécifique se veut mettre en avant quelques possibilités de gueuleton à (très) faible coût, elle n'en deviendra pas un prétexte aux effusions larmoyantes et dramatiques, aux inutiles et répétitifs « à bas la crise » comme aux ridicules et éculés « vive la récup' ».

Alors voilà le topo : si vous veillez à votre budget et que les conserves premier prix ou les plats préparés blêmes et plastifiés vous lassent, ou bien si vous faites la grise mine et le foie jaunâtre face à vos quotidiens demi-litre de Gevrey-Chambertin et tournedos Rossini ponctué de ses lamelles de truffe blanche, il n'est pas impossible que vous ne perdiez pas votre temps en lisant ces quelques modestes articles.

Un peu d'organisation ! Sans tomber dans la pédagogie assommante, il faut que tout ceci vous serve. Alors : tarif !

Pour deux personnes :

- 3 poireaux de taille moyenne : +- 1 €
- 700 grammes de pommes de terre Bintje : +- 1,5 €
- Une boîte de 120 grammes de foie de morue : entre 2,5 et 3 euros
- Une belle échalote : euh... disons 0,25 euro

1 + 1, 5 + 3 + 0,25 = 5,75 € ! Le voilà notre repère suprême : un repas équilibré pour deux pour 6 euros maximum.

On pourrait s'imaginer un dur labeur pour ce prix ; des gestes et des gestes à accomplir, une vaisselle sisyphéenne... Eh bien, pas vraiment. Une casserole, un peu d'eau et c'est tout. Pour le stoemp, je ne pense pas vous prendre en défaut : les pommes de terre coupées en dés grossiers et les poireaux en tronçons d'un centimètre et demi sautent dans un peu de matière grasse (que je ne compte pas dans l'addition, car vous la possédez déjà), un peu d'eau juste pour couvrir et 15-20 minutes de patience.

Une fois les pommes de terre tendres à friables, vous égouttez, vous écrasez, vous ajoutez échalote, sel et poivre... et pour lier le tout, ne perdons rien, gardons tout, utilisons l'huile exsudée du foie de morue contenue dans notre conserve. Outre son goût fumé et iodé légèrement atténué par le volume et les saveurs des légumes, elle conférera à ces derniers une onctuosité sans pareil, et je ne mentionne même pas les nombreux bienfaits qu'elle apporte et qui ne sont plus à prouver.

Tout ce petit monde n'a alors plus qu'à être monté esthétiquement à l'aide d'un emporte-pièce circulaire (ou octogonal, si ça vous chante...) afin d'accueillir, comme il se doit, le petit plaisir de la mer : sa majesté le foie de morue et sa légère couronne de fleur de sel.

Bon, à ce prix-là, on peut envisager une folie raisonnable : un petit riesling allemand sans prétention qui aura le don de ponctuer ce savoureux gueuleton pour pas un rond (ou presque).

À vous de goûter !

dimanche, octobre 6

[Papilles aux aguets] Choco (Delhaize) : sans huile de palme, Monsieur !






Voilà qui mérite d'être crié à tue-tête et sur tous les toits, à tel point que les opposants au lobby du tabac paraîtraient presque une bande de freluquets schtroumpfs à lunettes en schtroumpfparaison. Oui, oui, il est possible de concevoir un poison un peu moins empoisonné, histoire de voir les choses avec la tartine à moitié vierge.

Gardons la texture onctuo-collante, laquelle, depuis des générations d'occi-vilisation moderne, ponctue les petits doigts de nos progénitures qui évoluent alors, tactilement hélas, dans nos intérieurs proprets, au gré des curiosités à palper. Ah, les publicités ensoleillées, souriantes, aux couleurs vives, aux familles sans histoire toutes de félicité vêtues... Un arsenal bien construit pour nous faire avaler sans heurt couleuvres sucro-grasses par palettes.


                                                       

Gardons aussi le sucre comme premier ingrédient, avec le cacao (7,4 %, snif...) relégué loin loin, à la quatrième place, derrière l'huile de tournesol non hydrogénée et les noisettes (13 %, un peu mieux, mais re-snif quand même...). À ce niveau, c'est chou-crème et crème-chou par rapport au pseudo-démonopolisé que l'on sait du groupe Ferrero : un coup monté, une émulsion grasse très sucrée brunâtre à la forte odeur de noisette (notez la présence du très sibyllin « arôme » à la fin de la liste des composants, qui laisse poétiquement suggérer quelques ajouts pour faire mouche). Mais différence il y a, cher lecteur. Regarde bien... C'est précisément à la deuxième place qu'elle se situe. Oui, tu as bien lu... les mystérieuses huiles végétales, certainement issues d'une mixture gloubiboulguesque à la rentabilité éprouvée, ont été remplacées par une huile plus correcte pour nos petits corps : l'huile de tournesol. Par ailleurs, plus loin dans la liste figurent d'autres substances grasses tout aussi proclamées (beurre de cacao, noix de coco), lesquelles devraient ne pas trop faire sursauter les plus vigilants d'entre nous au beau milieu du rayon Petit-déjeuner.

Bon, et en bouche, ça donne quoi ? Le test a été effectué par mes soins auprès d'une jeune afficion-accro de six ans. Sitôt la tartine posée sur la table, sitôt les lèvres se furent prolongées de deux traits ébènes irréguliers soulignant le sourire malicieux et encore insouciant de la dégustatrice satisfaite. Après bref questionnement et test personnel (bien que je m'en sois désintoxiqué, il y a plusieurs années déjà), j'en viens à conclure que le produit ressemble à s'y méprendre à The Famous Nutella. Eh bien, pourquoi pas, ma foi...

En somme, qu'avons-nous là ? On évite heureusement l'écueil du produit-militant-sachant-militer-sur-tous-les-fronts-mais-que-personne-n'apprécie-de-déguster (rappelez-vous : le Faux Gras). On ne peut pas non plus dire que la tentative est malhonnête ; l'unique promesse proclamée (l'absence d'huile de palme) est tout à fait tenue. Le véritable défi se résumait finalement à deux choses : proposer un produit identique au leader du marché (gagné) pour un prix similaire (re-gagné ; le prix au kilo est même moins cher de quelques cents par rapport à celui du Nutella !). Après demeure la problématique de proposer à la jeunesse (et à la jeunesse vieille, comme disait le Grand Jacques ; pas celui du chocolat, celui qui faisait un véritable tabac, au sens figuré s'entend) un produit constitué en grande partie de sucre et de gras... C'est une évidence : la fin des mauvais réflexes n'est pas pour demain, mais ça, c'est un autre débat.

À vous de goûter !



vendredi, octobre 4

[Ce soir...] Quasi faux Wok de faux fond de frigo avec vrai poulet et vrai curry... vous suivez ?






...mais oui, vous suivez ! Et puis, il y a rien à suivre ! Un wok, c'est toujours pareil, mais c'est jamais le même ! Bon, là, je sens que je vous perds... Il faut dire que j'euphorise niais, que je blablate bébête... Revenons à nos oignons, occupons-nous de nos moutons : un wok (around the clock...) c'est un vrai communisme, que dis-je ! Une douce anarchie : pas de prioritarisme (grand mot pour une rime de carton pâte...), pas de hiérarchie ! Plongeon collectif de tout ce qu'on veut dans la chaleur de la matière grasse impartiale ; fristouillage sans favoritisme...

Tiens, deux vendredis, deux woks... Routine naissante, rituel plaisant. Eh oui, c'est en cette fin de semaine de début d'automne, devant la boîte carrée à images et de plus en plus vide d'idées, que crépitèrent mes lamelles de légumes (oignon rouge et blanc, courgette, poivron rouge, courgette, pomme) et poulet relevées de curry, d'un bon trait de sauce soja, parfumées de poivre de Sichuan... j'insiste : cette technologie persistante et automatique incitant à des passivités quotidiennes, si elle nous offre de vraies fausses coïncidences agréables (au royaume des séries et programmes de télédébilité, les ultimes bons films sont frêles aiguilles dans une botte de rien), ne peut s'empêcher de nous livrer ses mercantilistes ganacheries que d'aucuns gobent comme des petits pains au soleil (vous voyez un peu l'image ?). Non mais... Comment peut-on conseiller Solo liquide pour la cuisson d'un Wok ? Comment peut-on même imaginer flanquer des poireaux surgelés à la crème Igloo dans un gratin de poisson « maison » (regardez comme je graisse bien mes guillemets) ? Blabla, que du vide, que du vent...

Et pendant ce temps-là, nous nous affairons, humblement, tranquillement... Déjà, nos lamelles et nos gousses d'ail pilées ont perdu pas mal de leur eau de végétation ; aussi, quand la masse d'aliments a sensiblement décru, c'est au tour du lait de coco de venir rejoindre le méli-mélo parfumé. Pour la circonstance, j'ai choisi un produit que je souhaitais découvrir : une conserve de 400 ml de la marque Alter Eco contenant un produit équitable et issu majoritairement de l'agriculture biologique provenant du Sri Lanka... Fort bien, mais qu'en est-il en pratique ? Tout d'abord, belle surprise quant au prix : un rien moins cher que la marque que je choisis habituellement (Suzi Wan) ! Pas grand-chose à dire non plus quant au produit en lui-même : de la noix de coco, de l'eau et de la gomme guar (un stabilisant naturel). Le goût, c'est la vraie bonne nouvelle : bien que peu homogène (je suis tenté de dire : gage d'un produit naturel, même si ce n'est aucunement une vérité officielle ni immuable), le produit pourrait se manger à la petite cuillère et sans fin : c'est bon comme du petit lait, ça se boit comme du bon pain !



Bon, je sais, on n'ajoute normalement pas autant de liquide à un vrai wok ; les aliments doivent chauffer à température très élevée jusqu'au service... Mais ai-je dit que je ferais de l'académique ce soir ? Suis-je moi-même académique ? Qui suis-je d'ailleurs pour le prétendre, pour le suggérer ? Je vous propose une modeste mascarade, et j'espère que la vile et licencieuse interprétation que vous en ferez sera diablement bonne.

À vous de goûter !

lundi, septembre 30

[Ce soir...] Courgette farcie au quinoa tomaté aux herbes et aux câpres




Parce que ça contient majoritairement des produits de saison
Parce que lesdits produits sont respectés et assez peu transformés
Parce que cette transformation modérée implique la simplicité
Parce que, sans rentrer dans des détails biobobo militants, niveau empreinte carbone, c'est pas mal
Parce qu'il faut penser à votre petite santé, ma bonne dame !
Parce que c'est pas plus con à servir qu'un rôti
Parce que c'est savoureux, parfumé et bon, tout simplement...

Une poignée de Quinoa blond cuit à l'eau plongée dans une sauce tomate maison aux herbes (romarin, thym, basilic, origan, menthe...), à l'oignon rouge, à l'ail pilé, à la chair de courgette émincée, aux câpres et éventuellement relevée de quelques lamelles et/ou graines de piment ; le tout déposé dans une demi-courgette évidée précuite au four (30 minutes à 150°). Une vingtaine de minutes avant le service, la pièce complète passera au four pendant une vingtaine de minutes à 150°.

Veggie, gluten free, lactose free, recette de saison... On pourrait lui en coller des étiquettes à notre cucurbitacée garnie... Tâchons avant tout de la manger sans trop conscientiser la chose ; moi, les trop grands élans vertueux, ça me coupe l'appétit...

À vous de goûter !

dimanche, septembre 22

[Intermezzo] Figues rôties aux épices


Dimanche, dimanche... Jour du Seigneur (à heure fixe), du saigneur (chargé de la découpe du sacrosaint rosbif), des lessives, de la tarte au sucre de tata Julienne... Et des figues rôties ! Il ne tient qu'à nous d'instituer ce petit rituel qui ne durera qu'un temps, saisonnalité du produit principal oblige.

Ainsi, en cette succulente période de début d'automne, il est possible de dénicher de belles figues bien mûres à bon prix (comptons environ 0,75 euro la pièce en moyenne), même si, hélas, il semblerait qu'il faille se lever tôt pour dénicher les fruits les moins bourlingueurs possibles... Préférons les françaises et les italiennes ; les miennes étaient turques, c'est un pis-aller tout à fait honnête et convenable malgré tout.

Ce prix relativement démocratique conjugué aux nombreuses possibilités de préparation font des figues un réel bon plan tant en termes d'en-cas simple, que de dessert ou encore d'accompagnement d'un plat salé. Enfin, contrairement à l'orange ou à la banane, le petit fruit rond, à moins de le manipuler avec assez bien d'indélicatesse, ne devrait pas entrer en contact avec vos ordures ménagères, car, hormis le petit pédoncule au sommet du fruit, absolument tout se mange. Et n'y voyez pas là précepte bobotisant-fashion moralisateur ; l'intérêt gustatif en lui-même réside dans la dégustation intégrale du fruit : mélange de textures, de saveurs ; ce serait bien dommage de passer à côté.

Robuste ce petit produit ! Si bien que l'on peut l'associer à bon nombre d'ingrédients aromatiques assez prononcés. J'ai, pour ma part, souhaité joindre l'agréable à l'agréable (si si !) en optant pour des épices qui allaient dégager un parfum envoûtant dans ma cuisine. Ainsi, après avoir ouvert en quatre chaque figue sur deux tiers de sa hauteur, j'ai déposé, au centre de chaque pièce, une noisette d'un mélange souple de beurre mou, de miel, de cannelle et de noix de muscade. Pour corser le tout, mais considérez cela comme une étape facultative, j'ai versé une belle lampée de Maury (100 % grenache, aux grains mutés), que je tente par tous les moyens d'écouler, dans le plat avant d'y jeter trois clous de girofle.


 

Après une bonne demi-heure au four traditionnel à 180° (surveillez !), le plat sort et les effluves épicées gagnent chaque recoin de la pièce : mission accomplie !

 

Dévorées goulument encore chaudes, seules ou à côté d'un magret de canard braisé, elles ne devraient pas vous décevoir. En raison d'un surplus issus d'un précédent dessert, j'ai choisi de les servir sur une tartelette sablée déjà garnie d'une compote de pomme au miel parfumée à la cardamome et à la vanille. D'une succulence, l'autre...

 

À vous de goûter !

mardi, septembre 17

[Ce soir...] Moules chorizo, oignon rouge, persil, ail et vin blanc

 « En ce jour solennel et sous une pluie battante qui corrode les couronnes et taquine les képis, la cité du Doudou est heureuse d'accueillir les sérénissimes et majestueuses majestés royales P. & M... » (Limitation de caractères oblige.)

Effectivement, ça tombe : des cordes, des hallebardes, des chats et des chiens et des mini drapeaux à gogo... Enfin, ceci n'est que présomption. Votre serviteur, bien planqué derrière ses petits murs, suppute, suggère, imagine, divague, déconne, comme assez souvent d'ailleurs...

D'abord, il y a les acteurs indirects et vraisemblablement surpris par l'événement qui, pour cause de risette à sang bleu et de poignées de main sympathico-expéditives surnuméraires, resteront bloqués en périphérie de la ville, pensifs ou en pétard, au volant de la voiture familiale encore toute pleine à 9h30 en milieu de semaine, alors que les petits doivent se faire tout pimpants pour l'événement et que papa et maman, bien que plus ou moins respectueux des souverains, se rongent déjà les ongles jusqu'à la troisième phalange en songeant aux dossiers à finaliser pour avant-hier qui devront encore patienter quelques heures supplémentaires au moins...

Viennent ensuite les services d'ordre, mobilisés, stressés et conditionnés pour l'occasion ; sortez une banane de la poche intérieure de votre veste (ben quoi ?) et vous vous retrouverez par terre avant d'avoir eu le temps de dire « merde, ma banane ! » (Et ça tache la banane, surtout bien mûre...). Un tel déploiement de force, tout ça pour quelque tireur d'élite hypothétique qui aura pris soin de se déguiser en mémé rose et friable, celle-là même qu'on ne fouille jamais ; ou pour relever une poignée de jeunes gens culotte-courte-et-raie-au-milieu (celle qui ne l'est pas systématiquement, je vous en prie...) tombés subitement en pâmoison, après que l'une des majestés a tenté de s'aventurer sur un bafouillis d'échauffement hasardeux.

J'arrêterai là l'énumération des composantes de ce petit monde dont je ne fus pas et qui n'a peut-être même pas été tel que je l'ai envisagé ; quelle drôle d'idée d'ailleurs... Non, moi j'ai fait honneur... à mon plat. Après, on peut camoufler tout ça en hommage bien rangé et respectueux ; le mollusque en question étant, en quelque sorte, un emblème national à part entière... Patatras, voilà que je transgresse, que je blasphème encore, même dans mes tentatives de faux hommage... Oui, je l'avoue, à cette institution belgissime, j'y ai mis une touche hispanique... Que celui qui ne l'a jamais fait, même au niveau le plus élevé de notre charmante patrie, me jette la première dotation !

Voilà donc mon crime, même si je tiens à affirmer d'emblée que les animaux utilisés pour cette recette ont été correctement traités : une découpe fine et régulière des acolytes classiques du bivalve : céleri branche, carottes ; ainsi que des outsiders en vedette : l'oignon rouge (en partie haché pour la préparation et en partie tranché en fines rondelles à ajouter en fin de cuisson), le chorizo (en petits dès pour la préparation et en fins bâtonnets pour la déco), le persil frisé haché et l'ail juste écrasé afin que les sucs ne s'égarent pas sur la lame du couteau.

 
                     


Et puis ça va très vite, comme toujours : les légumes (carotte, céleri, oignon) et le chorizo sont sautés à feu moyen puis déglacés au vin blanc ; après une montée en puissance du feu (vif à très vif), les moules font leur « joyeuse entrée » dans la casserole pour cinq à six minutes de cuisson seulement. Quelques remuages plus tard, on ajoute les rondelles d'oignon et le chorizo en bâtonnets et puis, juste avant le service, le persil haché.

            

Tout ça se dévore seul (afin que personne ne puisse vous scruter dédaigneusement tandis que vous vous régalez à la dégustation frénétique de la succulente garniture et du jus bien relevé) ou en bonne compagnie... de frites, pourquoi pas, même si, vu la présence du chorizo, je verrais plutôt une pomme sautée croustillante épicée, ou une frite au paprika, soyons désinvoltes ! (Une, deux... fois ne sont pas coutume.)

Et pour ficeler le bec des stigmatiseurs et censeurs qui me verraient erronément dégommeur de tête couronnée, je citerai la phrase pleine d'un bon sens bien dosé d'un certain écrivain également issu du plat pays du grand Jacques :

Étant né belge sans raison, je n'ai aucune raison de cesser de l'être.
Georges Simeon

            

À vous de goûter !

vendredi, septembre 13

[Ce soir...] Wok « mon semi-fond de frigo »


Bon, avant toute chose, arrêtons-nous sur cette expression si courante et pourtant si floue... Fond de frigo ? Mais quel fond ? Selon quel axe de référence déterminons-nous cette réalité ? Le fond des bacs à fruits/légumes ? L'extrémité des clayettes ? Les bocaux, ça compte ? Sucré ? Salé ? Ton frigo est-il le mien ? Et le congélo ? Et la tête à Toto ?

À en juger par les nombreuses recettes invoquant ce concept, les fonds de frigo se résument généralement à ce que l'on omet de consommer rapidement... Comme c'est curieux, les délaissés sont bien souvent végétaux ; il est ainsi peu courant que la consommation d'une côte de bœuf soit repoussée aux calendes grecques. Modernité, mauvaises habitudes de consommation, mal/râle du siècle ; les mots sont peu de choses...

À concept large et imprécis, définition inutile et hasardeuse : le fond de frigo est la somme de tout élément esseulé, plus ou moins défraîchi et non valorisable à l'état de plat à part entière, laquelle somme est généralement employée de manière non hiérarchique et indissociable pour mener à bien la confection d'un repas souvent fortuit et improvisé.

Maintenant, si votre fond de frigo à vous ne compte pas de courgette, carotte, brocoli, poivron ou autre végétal lâchement délaissé, ne crions pas à l'imposture du recyclage, à la contrefaçon de la récup'... Hélas, vous n'aurez pas l'honneur de brandir le très hype et écobobo « fond de frigo » ; il vous restera le pis-aller du détail, le consolation que représente l'énumération des ingrédients savamment choisis pour concocter un petit plat sain et varié.





Reste l'emploi proprement dit des produits, la finalité technique de la bonne œuvre. Un wok... Rien de bien chinois, si l'on garde à l'esprit quelques règles élémentaires de base :

1) un wok se prépare dans un ustensile idoine (en fonte ou en inox revêtu) ;
2) ledit ustensile, après y avoir ajouté une matière grasse résistant à la cuisson, doit être amené à très haute température ;
3) les aliments doivent avoir plus ou moins le même gabarit afin d'éviter toute inégalité de cuisson (vous pouvez néanmoins préférer une découpe un rien plus fine pour les aliments dont le temps de cuisson est plus élevé) ;
4) ces derniers doivent être incessamment remués lors de la cuisson sous peine de finir carbonisés ;
5) nul besoin de trop hésiter ; les possibilités d'association sont surnuméraires, alors éclatez-vous !

 


Le mien est fait de poivron rouge, de carotte, de courgette, d'oignon, de brocoli, de poivre de Sichuan, de piment d'Espelette (vous avez dit cuisine « fusion » ?), de sauce soja ; voilà mon faux (car, chez moi, les légumes ne sont jamais délaissés) fond de frigo qui n'est vraisemblablement pas le vôtre. Un filet de porc « haut de congélo » a également été ajouté à l'ensemble, d'où le « semi » dans l'intitulé de cette recette.  Quoi d'autre ? Une bonne louche de riz rouge et un bon verre de Côte de Danube blanc (viognier). Non, c'est pas fond de frigo... Mais c'est vendredi, vous me pardonnerez bien un petit alignement de faux pas ?

À vous de goûter !









mardi, septembre 10

[Ce soir...] Pomme de terre Bintje farcie au foie de morue




Centième article = nouvelle porcelaine ?
Centième article = nouvelle cuisine ?

N'allons pas trop vite dans l'amalgame de coïncidences... Certes, votre humble serviteur a fait casserole neuve ; cela n'implique pas pour autant un revirement de tablier, un chamboulement du chalumeau. Gardons l'église au milieu du village, et les vaches seront un plat qui se mange froid.

Mais trêve de balivernage, voilà que sonne déjà l'alarme du four ; c'est chaud, ça fume... Bien, c'est ici que... Pardon ? Ah, Vous voulez savoir ? Bien, vite vite, car la rédaction d'un article jubilaire, tout maigrelet et succinct qu'il soit, ça creuse la dalle, pour dire les choses en toute délicatesse et poésie.

Nous voilà donc face à ces belles grosses et rondes Bintje, toutes fraîches et à peine tirées du sol, si bien qu'elles flairent encore bon le sous-plancher des meumeuh. Ni une, ni deux (donc trois minimum...), elles seront brossées sous un filet d'eau, puis placées dans un plat au four (180°) pendant une heure (selon le gabarit) à chaleur tournante. Une fois tendres comme beurre au soleil (les dents d'une fourchette vous seront d'une aide précieuse pour en juger) et précautionneusement décapitées dans le sens de la longueur (mais si, vous me suivez...), leur chair sera extraite à la petite cuillère et écrasée au presse purée ; y seront ajoutés : le foie de morue en boîte et une bonne partie de son huile (j'opte pour la marque Imperial et son produit légèrement fumé au bois de hêtre ; cf. l'article du présent blog consacré à ce petit plaisir iodé), une échalote hachée, quelques tours de moulin à poivre (noir), de la ciboulette fraîche ciselée. Après avoir été mélangée franchement et vigoureusement, la farce regagnera ses pénates ; et tout ce petit monde retournera au chaud (150°, toujours à chaleur tournante) pendant un bon quart d'heure.

À la sortie du four, chaque Bintje bien garnie trouvera sa place sur une assiette ; le petit côté fumé renforcé par une pincée de pétales de sel fumé (si vous en avez sous la spatule...) permettra une charmante association avec une salade de blé toute fraîche également corsée d'une vinaigrette moutarde-huile de noix. Deux tours de moulin, et je... et vous pouvez manger.

À vous de goûter !


vendredi, août 2

[Ce soir...] Filet de saumon façon Bellevue, macédoine fraîche recomposée et mayonnaise d'avocat




Chhhhhht !

Écoutez donc le chant des sauterelles, le pépiement des hirondelles, l'harmonieuse et périphérique musique du marchand de glaces mobile, les collisions amicales de verres long drink aux apéritifs très tardifs du crépuscule, lorsque la chaleur retombe, au moment précis où les vigoureuses progénitures des assis qui trinquent se chamaillent non sans pleurs ni heurts l'accès à la piscine gonflable rose dont le contenu - trouble tambouille tiède de mouchettes et de moustiques morts - rebuterait à coup sûr le plus sec et assoiffé greffier errant du quartier... Tiens, tant que nous en sommes aux chats : qui d'entre nous n'a jamais eu le bonheur d'ouïr la douce sérénade féline des nuits tempérées ainsi que le symphonique tintamarre de poubelles culbutées qui l'accompagne ?

Toute ironie mise à part, l'été, même très chaud, peut être l'occasion de rapides et sains en-cas. Aussi, si vous vous trouvez un petit coin tranquille à l'ombre et à l'abri des nuisances trop dilatées par la chaleur, je ne vous conseillerais que trop d'opter pour du simplissime et, surtout, du frais !

Pas de panique : la percussion de casseroles initiale n'est pas synonyme de gros mijotages bien lourds qui tapissent. Non, bien que fervent dévoreur de pot-au-feu, je me vois contraint de mettre mon faitout en veilleuse... Tous ces ustensiles, je vous l'assure, ne vous serviront qu'à apprêter vos ingrédients avant de les placer assez longuement au frais.

Dans l'ordre qu'il vous plaira, vous pourrez, par exemple : blanchir une poignée de petits pois pendant quelques minutes dans de l'eau bouillante additionnée de bicarbonate de sodium (astuce imparable pour conserver le beau vert des légumes) ; plonger quelques haricots verts dans la même eau après l'avoir vidée de ses premiers occupants ; faire cuire quelques jeunes carottes à la vapeur ; éplucher une ou deux nouvelles pommes de terre, les couper en gros morceaux et les cuire à l'anglaise jusqu'à ce qu'elles soient cuites mais encore fermes (car il s'agira de les découper en petits dés après cuisson) ; poêler un filet de saumon sur sa peau (si celle-ci n'a pas été impudiquement ôtée), puis le retourner et baisser le feu au minimum ; préparer une mayonnaise traditionnelle que vous ajouterez au mélange petits pois-pommes de terre une fois les ingrédients bien refroidis ; concocter une mayonnaise d'avocat en fouettant un demi fruit bien mûr réduit en purée avec de l'huile d'arachide, un peu de jus de citron, une cuillère à café de moutarde et quelques gouttes de jus de piment rouge (Tabasco, par exemple... mais chut, chut, pas de marque !).

Et puis voilà ! Pendant que le tout refroidit tranquillement au réfrigérateur, vous aurez largement le temps d'apprécier les conversations caniculairement fournies de vos voisins (pfiouuu, fait chaud hein ?) ou, dans le meilleur des cas, d'ouvrir une providentielle bouteille de muscadet bichonnée pour l'occasion.

À vous de goûter !

samedi, juillet 13

[Ce soir...] Osso-buco, ainsi soit-il.




Bien, bien, bien, nous y voici... Saison chérie ; journées chaudes fuyardes pourchassées par tenaces éclairs et drues averses, fidèles et déplorées queues de comètes belgissimes... Alors restons alertes, une main sur le k-way, l'autre sur la cocotte !

Car, et personne ne le contestera : un barbecue détrempé est un plat qui ne se mange pas. Brochettes dégoulinantes, hamburgers pâlots, merguez mollasses... Les visages passeront très vite du rubicond bière au penaud minéral, qu'on se le dise. Et narquois seront les fourmis prudentes, dédaigneux les porcins planqués derrière leurs forteresses de briques, et ricaneur sera tout autre précautionneux de la tambouille qui aura eu la bonne idée de ne point s'ébaudir ostensiblement, tandis qu'il préparait, en catimiamiam, un trésor bien vite dégluti.

Il pourra s'agir d'une belle blanquette d'arrière-saison, d'un couscous aux viandes mijotées ou d'un osso-buco sans prétention, sinon celle de soumettre les muscles faciaux à un élégant étirement labial, communément appelé « sourire ».




La satisfaction sera, par ailleurs, d'autant plus au rendez-vous, si le jugeoté gourmand, conscient des efforts qu'il ne désire point entreprendre, décide de se délester de toute complexité, finalement inutile en l'occurrence.

Ainsi, l'osso-buco sera-t-il mitonné sans chichis, ni blabla, ni flafla. Aussitôt les rouelles de veau colorées dans un mélange de matières grasses composé d'au moins 50 % d'huile d'olive (afin d'éviter que la viande ne colle), celles-ci laisseront la place à (dans l'ordre) : trois échalotes émincées, trois gousses d'ail écrasées et émincées, une tige de céleri vert découpée en très petits dés (mirepoix), quelques carottes (juste grattées mais non pelées) découpées en sifflets, du persil frisé ciselé, du bouillon de boeuf, du vin blanc, du sel, du poivre noir et un bouquet d'herbes fraiches (romarin, origan, thym).

S'en suivra un plongeon des rouelles précuites, un mijotage d'une bonne heure trente et, une demi-heure avant le service, l'ajout d'une bonne cuillère à soupe de concentré de tomates et de quelques champignons de Paris préalablement escalopés et poêlés.





Clou du pompon paroxystique : tandis que les cigales, à peine imbibées sitôt bien mouillées, décamperont sur leurs gambettes en short, bien loin de leur bûcher anéanti, le quasi repu abrité aura la bonne idée d'ajouter aux tagliatelles rescapées de son assiette déjà clairsemée le précieux contenu de l'os de circonstance ; le parfum des herbes, la saveur du bouillon réduit, la puissance aromatique de la moelle... Une formule à grimoiriser sur le champ !

Pour celles et ceux qui ne l'auraient pas encore compris, ceci se déguste au sec avec, par exemple, un negroamaro issu de la région Salento (le talon de la botte italienne) ; un vin qui aurait également pu se siroter au soleil avec quelques grillades, soit dit en passant.

À vous de goûter !

samedi, juin 29

[Ce soir...] Joues de raie, mousseline de brocoli et câpres, risotto safrané



Majestueux, impressionnants et géométriquement différents, les rajiformes sont un peu les zèbres de la savane sous-marine. Généralement assez amicaux vis-à-vis des bipèdes potentiellement curieux que nous prétendons être, ils continuent de séduire plus d'un regard émerveillé dans les parcs zoologiques et autres infrastructures spécialisées en biologie marine. Qui, parmi nous, a pu résister au fameux guiliguili du tégument rugueux recouvrant l'animal finalement assez peu farouche, à la limite de la synanthropie (pauvre de lui !).

Or, ombre au tableau ou possibilité sustentatrice supplémentaire (selon les principes et appétits de chacun), il semblerait que ce joli minou-minou des mers possède une chair relativement prisée des piscivores convaincus et souvent voraces. Hélas, hélas ! La plupart des établissements qui la proposent se contentent de n'en préparer que les « ailes », à savoir, une partie seulement de leurs nageoires...

Le reste est-il rejeté à la mer ? Négligemment envoyé aux ordures et en pâture aux félidés affamés de passage ? Ou, au mieux, recyclé dans un potage récup' de fortune ? Il est malheureusement très probable qu'il en soit ainsi...

Néanmoins, quelques rares poissonniers, qui résistent encore et toujours à l'envahisseur industriel grégariste, semblent rendre un hommage bien plus personnel et réfléchi à l'animal en en proposant d'autres parties, et notamment les joues. Il en va, à ce niveau, des connaissances culinaires élémentaires ; veau, vache, cochon (couvée !), cabillaud, lotte... tous ces animaux ont le point commun d'arborer leurs chairs les plus succulentes de la manière la plus ostentatoire qui soit : sous les yeux, entre les oreilles/ouïes et la bouche.

Or, malgré l'envergure impressionnante que peuvent avoir certains spécimens, leur faciès on ne peut plus plat ne laisse pas réellement place au développement d'une charmante boubouille rebondie. Fragiles et de taille modeste, les joues sont généralement vendues avec le cartilage qui les soutient ; ce dernier devra être conservé lors de la cuisson afin de ne pas risquer de trop charcuter chaque pièce.

La cuisson, parlons-en ! Rien de très sorcier ; un peu d'huile d'olive dans une sauteuse en inox, un feu moyen, et les joues y trouveront leur compte. Bien que ressemblant, en termes de délicatesse et de masse, à des noix de Saint-Jacques, les morceaux devront être cuits un peu plus longtemps ; comptons un petit quart d'heure à feu moyen (dont cinq minutes à couvert). Si l'humidité venait à manquer, n'hésitons pas à ajouter une goutte de vin blanc sec qui parfumera, au passage, les chairs.

C'est doux, délicat et ça fond sur la langue... Et puis quoi ? Un petit risotto, par exemple : safrané et auquel sera ajouté, en fin de cuisson, les sommités crues d'un bouquet de brocoli bien frais. Et, comme rien de se perd, le pied et le restant du bouquet seront cuits à la vapeur avant d'être mixés avec quelques câpres (sempiternels alliés dudit poisson) au vinaigre, un peu de bouillon restant après préparation du risotto, un rien de sel et du poivre blanc ; il en résultera une mousseline parfumée dans laquelle vous pourrez trempouiller goulument chaque bouchée poissonneuse.

En compagnie d'un bon petit chardonnay argentin, voilà de quoi faire joue-joue avec distinction en ce gris début de congés scolaires.

À vous de goûter !