dimanche, août 23

[Ce soir...] Noix de Saint-Jacques snackées, beurre blanc au paprika, fenouil farci






De l’eau, du sang, de la sueur, des larmes, du pinard, de la bibine, de la gnole et j’en passe ont coulé sous les ponts (ces enjambées massives déposées nonchalamment sur mes derniers mois, et qui n’ont eu de cesse de m’engourdir non pas les tressautements créatifs de ma petite carcasse blanchâtre, mais bien les velléités exhibitionnistes desquelles je me rends gaillardement de nouveau coupable, en vers et contre vous, mes chers et fidèles détracteurs détraqués) depuis que je ne me suis plus pourléchamment épanché sur une énième expérience mary-shelleysque réalisée à quatre mains cette fois-ci et avec le concours de quelques ingrédients succupuleusement sélectionnés.

Qu’avons-nous donc commis de concert (à défaut de commis de cuisine) en ce samedi 22 août de l’an de (dis)grâce 2015 par une soirée estivalement indescriptible (ben oui, on était à l’intérieur, nous, comment auriez-vous voulu qu’on sache ?!) où les beuglements pseudo-civilisés de l’extérieur ne nous atteignaient plus qu’avec peine, tant nous avions érigé nos habituelles murailles d’indifférence expérimentée ?

Je vous le dis Tourette et sans insulte auCUne, rien ne nous haBITE plus que la fantaisie et la volonté de nous exprimer à nous-mêmes (et tant pis pour les autres !) au travers d’ébauches de sagesse fanfaronnes qui fait bobo la routine. Rien de bien sérieux donc au programme, juste une mêlée d’idées diablement entichées l’une de l’autre… !

Sur la cène, nous avons : quelques noix de Saint-Jacques  (disons quatre ou cinq par personne), des bulbes de fenouil (comptons un pour deux s’ils sont gros ou un par personne dans le cas contraire) dont vous n’ôterez que la base (pas d’émasculation excessive, non mais !), une tranche de pain sec (rassis diront les moins tolérants), 10 cl de lait, 1 œuf (pour 2 petits fenouils), une bonne poignée de pecorino râpé, du sel, du poivre, un godet de vin blanc, une larme de vinaigre, une échalote, du paprika et moult beurre (car comme dirait mon cousin germain : « Y faut baratter ta recette, mein Freund ! »).

Du classique naît l’hérésie. Un certain Pablo du Pinceau, virtuose dans l’art des bouillons-cubes n’avait-il pas proféré un jour qu’il fallait maîtriser les règles pour mieux les transgresser ?! Je vous le demande… 

Ici, les règles sont simples : une cuisson vapeur des demi-bulbes de fenouil dont l’intérieur sera ensuite soigneusement prélevé et mixé avec l’œuf, la tranche de pain trempée dans le lait, le lait résiduel, du sel, du poivre ; la mixture sera ensuite replacée dans les demi-bulbes creusés. Quelques pincées de pecorino râpé par bulbe farci et on enfourne à 180° pendant un petit quart d’heure.
 À présent, on ricane moins, on décroise les paluches ; va falloir se la jouer Vishnou toqué et réaliser trois préparations minutes en moins de temps qu’il n’en faut pour zapper sciemment quelque émission socio-culturelle de chaîne privée de fin d’après-midi diffusée quelque part entre le bain du petit et les nouilles trop cuites. Tout d’abord, lancer un beurre blanc : émulsion chaude instable par excellence, il s’agit d’incorporer rapidement du beurre froid découpé en cubes à une réduction de vinaigre blanc et de vin blanc (comptez 1/4-3/4) ponctuée d’une échalote hachée (préalablement suée au beurre, dans notre cas) et de poivre moulu. Une fois la sauce montée au fouet, ajoutons-y une petite cuillère à café de paprika et les pluches de fenouil hachées menu. Et comme rien ne se perd, la deuxième de ces préparations consiste en la cuisson à l’huile d’olive des tiges des fenouils découpées en rondelles, assaisonnées d’une pincée de sel. Enfin, dernier geste des plus académiques, la cuisson reine des Saint-Jacques : un passage d’une minute sur chaque face dans un beurre noisette très chaud  afin d’obtenir une coloration idéale et une concentration en goût maximale, tout en conservant une tendreté suffisante et une belle couleur nacrée des chairs. 

Après, comme toujours, il faut présenter la chose. Nous, on a visé le classique : la sauce ne dévalant toutefois pas trop loin des demi-fenouils, avec lesquels elle fera de belles et joyeuses secondes noces, sans pour autant vexer la Saint-Jacques, déjà succulente en elle-même, animée de quelques rondelles de tiges de fenouil sautées et légèrement amères.

Et puis, arrosez cela comme il se doit : un bourgogne blanc de caractère (un chablis qui se respecte, un givry de bonne facture…), un riesling d’outre-Rhin bien aromatique…

À vous de goûter !