On y est ! En plein dedans ! La saison la plus riche en plaisirs de bouche éphémèrement savoureux nous enlace enfin de ses bras humides et parfumés. Si d'aucun considèrent l'automne comme un brelan de mois propices à quelques déprimes et morosités extensibles, je préfère me concentrer sur son potentiel gastronomique hors du commun. Fruits secs, courges d'hiver, champignons, gibiers... D'octobre à décembre, la variabilité se conjugue à une concentration impressionnante de goûts et de textures.
Or, outre celui des papilles, l'automne est également source de plaisirs oculaires tout aussi variés et éclatants. La mort annuelle et docile des végétaux est toujours l'occasion d'un spectacle simplement envoûtant. Dans les bois, les averses de feuilles mortes valent tout à fait les champs morts-nés de jacinthe des premiers jours de mai. Ainsi, c'est parmi ces jolis lambeaux inanimés et bientôt gobés par l'humus que naissent l'une des merveilles les plus fragiles et les plus aléatoires du moment : les champignons.
Sans entrer dans les détails des espèces apparaissant en milieu de saison (car il y en a plus qu'un paquet...), je me concentrerai sur les deux espèces que j'ai eu le plaisir de rencontrer en ce beau dimanche après-midi : le cèpe de Bordeaux (un unique spécimen) et le bolet bai (douze spécimens). Bien qu'ils puissent très bien s'associer (le bolet bai étant d'ailleurs considéré comme le substitut du cèpe de Bordeaux en cas de mauvaise saison dudit champignon), j'ai préféré les préparer et les déguster séparément afin d'en apprécier pleinement les caractéristiques.
Trêve de glose, passons à ce qui vous intéresse sans doute : les recettes proprement dites.
Commençons par le potage dont la préparation ne tient qu'en très peu d'étapes : couper un potimarron en deux, en ôter les graines et le découper en gros cubes de deux centimètres d'arête ; dans une casserole dans laquelle un peu de matière grasse fait déjà chanter quelques oignons émincés, ajouter les cubes de courge et les faire sauter quelques minutes ; assaisonner d'une pincée de gros sel et ajouter suffisamment d'eau pour couvrir les cubes (si quelques-uns flottent, c'est normal) ; laisser cuire pendant une petite heure à feu doux, puis mixer l'ensemble. Dans une poêle, faites fondre une noix de beurre ; lorsqu'il frémit, ajouter le cèpe de Bordeaux coupés en fines tranches (environ 3 mm d'épaisseur) dans le sens de la largeur. Saler d'une pincée de fleur de sel. Éteindre le feu dès que les tranches se colorent légèrement et les déposer simplement sur le potage juste avant de servir.
Devant une telle simplicité, je présume que vous ne souhaiterez pas non plus vous arrêter en si bon chemin. Qu'à cela ne tienne, vous avez des bolets bai dans votre panier ! Certes, leur nettoyage prendra un peu plus de temps (il convient d'en ôter les pieds et le « foin », situé juste au-dessous du chapeau, contrairement au cèpe qui se mange du chapeau à la tête, et d'en nettoyer la surface du chapeau à l'aide d'un chiffon légèrement humide), mais le jeu en vaut nettement la chanterelle (navré, c'était trop tentant...). Après avoir ôté circulairement l’extrémité de chaque chapeau à l'aide d'un bon couteau sur un millimètre, découper les chapeau en cube d'un centimètre d'arête ; dans la poêle ayant servi à la coloration des tranches de cèpe, ajouter éventuellement un peu de matière grasse et faire chauffer les cubes de bolet à feu vif, saler et réserver. Dans une verrine, déposer une petite quenelle d'un pesto de basilic rouge (pour le préparer : mixer ensemble une poignée de pignons de pins torréfiés, une grosse poignée de feuilles de basilic rouge, quelques copeaux de parmesan, une pincée de gros sel et quelques cuillères à soupe d'huile d'olive) ; déposer ensuite quelques cuillères à soupe de champignons et terminer par une nouvelle petite quenelle de pesto. Cette petite fricassée s'accommode très bien d'une petite salade de mâche rehaussée de sel, de poivre et d'un peu d'huile de noix.
Voilà un plateau télé de saison haut en goût et en couleurs qui n'aura à rougir devant aucun de ses collègues cerclés de plastique, de film hermétique et d'atmosphère protectrice non identifiée.
À vous de goûter !
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