dimanche, avril 7

[Ce soir...] Côte de porc à l'berdouille



En période de vache maigre, mangeons du porc gras, prétendrait (ou prétendra, désormais) une célèbre (hum...) maxime montoise. Si, à l'instar de certains autres mots d'esprit (re-hum...), ces propos ne doivent, de préférence, pas être pris au premier degré, ils décrivent toutefois avec pertinence (je crois qu'il vaut mieux que j'arrête les « hum »...) les contours d'une nouvelle philosophie alimentaire qui s'ébauche peu à peu, tandis que les pépètes filent davantage dans le réservoir de carburant que dans le caddie de supermarché.

Car, en termes de prix, le porc, c'est finalement le moins pire, si l'on met de côté le cheval, bien que l'on puisse, depuis assez peu de temps, l'acheter au prix du bœuf sans même sans rendre compte (on n'arrête pas le progrès...). Ainsi, si le porc, tout comme le pauvre équidé tant conspué, pourra être utilisé comme succédané crapuleux de la royale viande rouge devenue rare sur les tables de Monsieur et Madame Classe-moyenne-et-en-deçà, moyennant néanmoins une transformation bien plus musclée afin de savamment anéantir cette maudite différence de couleur et de texture initiale, il reste indéniablement un choix économique raisonnable pour les foyers les plus modestes désireux de consommer une bidoche correcte...

Or, il est une évidence que le porc n'a aucunement à rosir face à ces vaniteuses volailles et vaches outrecuidantes. Même sa réputation de viande grasse ne pourra réellement lui porter préjudice ; pour éviter le trop de gras, vous en mangerez moins et vous augmenterez la quantité de légumes de saison pas trop chers... Ou comment démultiplier les économies sans véritablement s'en apercevoir.

Pour suivre cette logique, commençons par quelques idées végétales simples pour compenser la dimension grassouillette de ladite viande. Si une laitue (elles reviennent enfin sur les étals des marchés, hip hip hip enfin !) tout simplement assaisonnée (sel, poivre, huile d'olive et vinaigre blanc) sera le juste contraste, elle sera agréablement secondée d'une salade de carottes rappées bien vinaigrée et poivrée (du poivre blanc de préférence), voire d'un chicon braisé à l'ail bien tendre pour tenter une association « cru-cuit » des garnitures.

Comment ? Vous souhaitez accompagner vos accompagnements ? Bon, si vous y tenez... Dans ce cas, revenons à nos cochons et notamment à l'un des morceaux les plus populaires de l'animal : la côte ou côtelette, de son charmant diminutif. Choisissons-la avec os, désossée, avec couenne, découennée, nature ou présalée, peu importe ; la cuisson sera peu ou prou identique : poêlée à feu vif, chaque pièce sera colorée sur ses deux faces puis mise de côté. Par micropatriotisme (un néologisme idiot pour un concept idiot) ou par simple envie du moment, je me suis laissé inspirer par le plat officiellement patrimonial de tradition montoise (adjectif relatif à Mons, la ville du plat pays qui a vu naître votre serviteur et qui compte un deuxième singe parmi ses citoyens, muet et en bronze, celui-ci). Son petit nom vous mettra, j'en suis persuadé, l'eau à la bouche ; il s'agit de la « côtelette à l'berdouille » (côtelette à la boue, en bon français).

Miam, miam à souhait, n'est-il pas ? Que peut-il donc bien se cacher derrière ce magnifique intitulé ? De quoi peut bien se composer cette... boue ? Je vous le donne en mille : de tout et de rien, voire de bien des choses, selon l'humeur du confectionneur tout-puissant. Si certains y mettent de la bière, tandis que d'autres préconisent le vin blanc, si une recette familiale reprend le concentré de tomates parmi ses ingrédients, alors que les cornichons se trouvent en nombre restreint par rapport aux échalotes selon la recette du restaurant du coin, tous les constructeurs amateurs ou professionnels de ce plat du jour par excellence s'accorderont sur l'élément constitutif de la fameuse « berdouille » : la moutarde. 

Ajoutée aux condiments émincés (généralement des cornichons au vinaigre et des échalotes) poêlés dans les sucs de cuisson de la viande, puis déglacés (au moyen de vin blanc, de bière, voire d'eau claire), elle sera le liant, elle sera le piment, elle sera le succulent. Une fois cette base assise, ce sera à votre sensibilité de prendre la relève : concentré de tomates, crème... en n'oubliant surtout pas une belle dose d'estragon (de préférence frais et ciselé, en saison), sans quoi la berdouille ne sera que triste flaque sans remous.

Mais c'est que notre viande paraîtrait misérable face à la cohorte de légumes qui l'accompagnent ! Aussi, comme il nous a été prouvé par a + b comme 2 et 2 font 4 qu'il était nécessaire que nous mangions équilibré, équilibrons notre assiette en y ajoutant une poignée de frites bien de chez vous et en l'accompagnant du vin blanc ou de la bière à la base de la berdouille.

À vous de goûter !

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