dimanche, novembre 24

[Ce soir...] Soupe de chili con carne ou chili con carne en soupe, comme vous voulez...



« Mange ta soupe ! » Si beaucoup d'entre nous n'ont jamais eu à subir ce type d'injonctions traumatisantes qui font froid dans le dos, et ce dans le simple et humble but de se donner chaud à la carcasse (un mal pour un bien, mais un mal tout de même !), ces trois mots, si impérieux soient-ils, restent immanquablement associés à une tradition poussiéreuse mais néanmoins chaleureuse : le rituel du potage quotidien ; celui qu'à l'origine, on ingérait avant tout à des fins de préremplissage tempéré et réconfortant d'un estomac qui allait très probablement risquer de ne point trouver son compte avec le frugal plat, généralement sans fioritures, qui allait suivre (dans le meilleur des cas).

Aujourd'hui, époque fastueuse et apologétique des légumes racines et autres tubercules que l'on aurait pourtant été tenté d'éradiquer de la surface du globe en des temps passés plutôt pénibles pour nos aînés, les soupes ont incontestablement la cote (et la côte aussi, si l'on y met des bettes, par exemple...). Les plus siphonnés du chaudron d'entre nous s'emploient d'ailleurs à tenter les associations les plus inimaginables, pour le meilleur comme pour le pire des résultats. En cette belle saison préhivernale, il semble que tout un chacun soit tenté d'y aller de sa propre mixture et de surfer sur cette tendance liquide avant qu'elle ne déborde et que l'on passe à autre chose, comme toujours.

Forme hybride et inclassable, pourtant servie dans nombre de restaurants, généralement outre-Rhin ou plus à l'Est et au Sud de l'Europe, selon les ingrédients, la soupe-repas est ce que l'on pourrait nommer la quintessence de la gourmandise d'assiette creuse. En une louche, vous voilà embarqué instantanément pour un petit monde à part, au chaud et en confiance. Étant moi-même partiellement germanique, je pourrais citer de très nombreux exemples, parmi lesquels les célébrissimes : Kartoffelsuppe (soupe de pommes de terre avec lardons ou rondelles de saucisse), Erbsensuppe (même principe mais avec des pois cassés) ou encore la Gulaschsuppe (soupe rouge épicée d'origine hongroise consommée dans une grande partie des pays d'Europe de l'Est ainsi qu'en Allemagne ; selon les versions, elle peut inclure des morceaux de bœuf, de porc, de cheval, de veau ou d'agneau).

En y songeant bien, ces plats ne sont finalement, à la base, « que » des plats mijotés auxquels a été ajoutée une certaine quantité de liquide qui a provoqué ce changement de catégorie. Aussi me semble-t-il tout à fait possible de créer des soupes à base de quelque tambouille traditionnelle habituellement restée non travestie (par principe, par orgueil, je l'ignore). Un bon chili con carne maison ne devra, par exemple, pas être trop chamboulé que pour acquérir son statut de soupe-repas. Ainsi, selon l'usage (même si les versions pullulent), après avoir fait sauter oignons et ail émincés, poivron rouge et courgette en petits dés, ainsi que les haricots noirs encore fermes (que nous aurons pris soin de faire tremper une nuit, puis de cuire à l'eau pendant une demi-heure) pour changer des rouges, nous ajouterons cumin, piment moulus et une bonne quantité de bouillon de boeuf maison ainsi qu'une boîte entière de tomates concassées en cubes. Le bouillon étant déjà salé, je préconise de rectifier l'assaisonnement en sel après l'ajout de celui-ci. En fin de cuisson, pour aligner une couleur supplémentaire, quelques grains de maïs précuits peuvent être de bon aloi, si le cœur vous en dit. Une envie du moment m'a, par ailleurs, incité à ajouter quelques tranches de chorizo doux ; mais comme pour chaque étape : c'est vous qui voyez.

Et puis, c'est comme pour toutes les soupes : on laisse faire, on laisse prendre leeeentement. Au reste, si le liquide ne vous semble pas assez épais, rien ne vous empêche de laisser mijoter quelque temps à découvert pour que ça réduise. Il ne nous reste plus alors qu'à patienter (étape la plus pénible !), et à s'en offrir quelques louches. À mon sens, aucune boisson ne pourrait enjoliver ce plat tout-en-un qui se suffit à lui-même. Vos meilleures armes ? Une cuillère à soupe qui tient la route. Et un verre d'eau, à la rigueur, si vous y tenez...

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