samedi, novembre 30

[Papilles aux aguets] Quatuor chocolaté sous la loupe

Une table basse plus ou moins large et libre d'accès : c'est fait. Un bon siège garant d'une détente musculaire optimale : disponible. Un quasi-silence savamment brisé par un fond musical de bon aloi (un Tindersticks qui prend succulemment son temps) : OK aussi. Tous les ingrédients semblent réunis pour un agréable début de soirée placé sous le signe de la dégustation.

Au menu du jour, un produit on ne peut plus inégal, dont un pied traîne dans la boue peu reluisante de la catégorie des sucreries, tandis que l'apex de l'aile touche l'excellence des plaisirs les plus fins. En plaques, en bâtons, en pépites, noir, au lait, blanc, marié avec condiments, fruits et épices, en veux-tu en voilà... Le chocolat, c'est un peu le palliatif en vente libre, la drogue douce - très douce - que l'on s'injecte à pleines dents, le vice que l'on confesse vertueusement et avec le sourire...

Nul besoin de vous dissimuler mon absence total d'intérêt pour certains produits sucrés chocolatés desquels la simple énumération de la composition vous ferait réclamer fissa votre kit du petit chimiste au grand mitré rougeaud de saison, ce lapomaniaque perfide qui lui-même distille ce genre d'horreurs diabétisantes et répond ainsi aux desiderata déjà insistants de notre attendrissante faune en culotte courte, laquelle ignore tout à fait qu'elle s'exerce candidement aux sous-disciplines initiatiques de l'appât du gain. (Respirez.)

Nous parlons bien ici de chocolat, soit d'un aliment dont le premier ingrédient de base est la pâte de cacao. Par ailleurs, pour éviter toute comparaison trop complexe et protéiforme, j'ai souhaité me restreindre aux critères de sélection suivants : il doit s'agir de chocolat noir ; le pourcentage de cacao doit être de 70 % minimum ; la liste des composants ne doit pas contenir de dénomination douteuse.



Cette étape étant franchie (ouf !), il est maintenant possible d'opérer une dégustation plus ou moins équilibrée de quatre produits d'une même gamme, à savoir : le 70 % Intense de Galler, Alter Eco noir du Pérou, Ethiquable noir du Nicaragua (tous deux affichant 75 %) et le chocolat cru de la marque Ombar (72 %). Une sélection qui, je précise, est comme toujours pétrie de l'excessive subjectivité qui est la mienne. Bon et en bouche, ça donne quoi ?

Autant vous le dire d'emblée : le moment est des plus plaisants ; je ne pourrais ainsi honnêtement me permettre de rejeter l'un ou l'autre des candidats pour une raison arbitraire et définitive. D'ailleurs je les garde tous ! Avec cependant quelques préférences... Alors en piste !

Texture : première impression des produits (au-delà du visuel qui, dans le cas présent, ne varie que très légèrement) ; si le Galler séduit par son onctuosité et son homogénéité, Alter Eco et Ethiquable dévoilent un côté plus sauvage, plus brut,  assez appréciable également : ça croque plus que ça ne fond. Quant à Ombar, la température de cuisson bien plus faible par rapport à celle habituellement utilisée pour un chocolat dit « normal » donne à ce chocolat « cru » une texture tout à fait particulière assez lointaine des standards classiques : un mélange intrigant de poudreux et de gras soyeux.

Amertume : caractéristique fondamentale du chocolat noir, celle que l'on adore ou que l'on fuit. Naturellement, une personne souhaitant limiter ce titillement contre-nature du palais s'orientera davantage vers le Galler (au pourcentage de cacao le plus bas, pour rappel) dont l'onctuosité va de pair avec une saveur douce-amer fort bien équilibrée. Il ne se démarquera toutefois pas outre mesure du produit Ombar, adouci par du sucre de noix de coco, ni des deux tablettes équitables quoiqu'un rien plus « piquantes ». La chose aurait été bien plus palpitante si un intrus 85 % voire 99 % (le genre de produit que l'on ne goûte qu'une fois...) s'était immiscé dans la partie.

Arômes : c'est là que ça se joue. Galler, comme à son habitude, nous propose quelque chose de très carré et scolaire : fruits secs, grillé, peu fruité, soit une formule gagnante bien connue. Les trois exotiques sortent assez bien des sentiers battus pour le palais finalement assez peu initié qui est le mien. Ainsi, pour Alter Eco, on pense directement aux baies séchées de type canneberges ou encore à du pruneau ; c'est nettement plus fruité et un poil âpre, surprenant mais pas déplaisant. Chez Ethiquable, c'est un peu plus conventionnel ; on aurait même l'impression d'un pourcentage de cacao inférieur au chiffre indiqué, tant l'attaque parait modérée ; la saveur générale balance entre le fruité et le grillé, ce qui n'est pas particulièrement négatif, même si ce manque d'affirmation m'a quelque peu déçu. L'OVNI Ombar surprend de nouveau par sa singularité ; si j'avais beaucoup appréhendé le moment de la dégustation après avoir lu le mot « coco » sur l'emballage et craint une présence écrasante dudit fruit, je suis très agréablement surpris de constater qu'il n'en est rien, ou presque. Si l'on sent d'emblée qu'il n'y a pas qu'une seule « âme » dans cette petite tablette, la qualité et le traitement délicat du cacao utilisé donnent à ce dernier une force assez hors du commun qui garantit un succulent duel au sommet.

Et le prix ? Mince le mot qui fâche... Avant d'annoncer les chiffres, rappelons qu'il s'agit là de produits de dégustation et non de la bonne demi-livre enturbannée de plastique mauve et boviné que l'on s'engouffre à la sauvette. Au reste, les trois premiers de la liste affichent des prix plus ou moins similaires et finalement plutôt raisonnables : si les 80 gr de Galler ne dépassent pas les 2 euros, le prix des 100 grammes des équitables Alter Eco et Ethiquable oscille entre 2,20 et 2,50 euros. Et c'est de nouveau le petit cru qui se distingue en crevant le plafond avec ses 2,50 € pour ses maigres 68 gr. 

Pour conclure, je ne peux que reconfirmer l'agréable moment passé en cette si charmante compagnie. Par ailleurs, en terminant récemment les paquets des deux produits équitables et du chocolat cru (qui, pour votre information, est également certifié bio), j'ai constaté que l'intérieur des trois emballages recelaient d'explications tantôt informatives tantôt humoristiques, lesquelles ajoutent aux produits une petite note ma foi fort bien sympatoche. Des plus, des moins, des goûts, des couleurs ; de nouveau, la formule s'impose...

À vous de goûter !

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